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CONCUBINAGE – ENRICHISSEMENT SANS CAUSE – ENRICHISSEMENT INJUSTIFIÉ

Le 22 décembre 2017

L’application de la notion d’enrichissement sans cause nécessite la réunion de plusieurs éléments :

 

-          Un enrichissement ;

-          Un appauvrissement corrélatif ;

-          L’absence de cause ;

-          L’absence d’autres moyens pour agir.

 

Il doit être prouvé qu’il n’y a pas de cause à l’enrichissement et à l’appauvrissement corrélatif.

 

La jurisprudence précise ainsi qu’il incombe à la partie qui invoque l’enrichissement sans cause, d’établir que l’appauvrissement par elle subi et l’enrichissement corrélatif du défendeur ont eu lieu sans cause.

(Cassation Civile 1ère 18 juin 1980 – Bulletin Civil 1 n°191 ; 24 octobre 2006 DALLOZ 2006 IR 2947).

 

Les dispositions de l’article 1303-1 précisent désormais, dans leur version issue de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 :

 

« L’enrichissement est injustifié lorsqu’il ne procède ni de l’accomplissement d’une obligation par l’appauvri ni de son intention libérale. »

 

L’article 1303-2 en son alinéa 1 précise aussi :

 

« Il n’y a pas lieu à indemnisation si l’appauvrissement procède d’un acte accompli par l’appauvri en vue d’un profit personnel. »

 

La jurisprudence de la Cour de Cassation en la matière est tout à fait claire :

 

-          Dans un arrêt de la 1ère Chambre Civile de la Cour de Cassation du 12 novembre 1998 (n° du pourvoi 96-21198), il a été jugé :

 

« Attendu qu’après avoir vécu 18 ans en concubinage avec Madame Z dans une maison dont elle était propriétaire, Monsieur Y l’a assigné, sur le fondement de l’action « de in rem verso », en vue d’obtenir le remboursement des travaux par lui effectués dans cette maison ; qu’il fait grief à l’arrêt attaqué (Cour d’Appel d’Orléans 10 septembre 1996) de l’avoir débouté de sa demande, tout en constatant que certains travaux avaient apporté à l’immeuble une plus-value incontestable et d’avoir ainsi violé, par refus d’application, l’article 1371 du Code Civil ;

 

Mais attendu qu’après avoir souverainement considéré que l’appauvrissement de Monsieur Y avait une cause constituée par son hébergement pendant 18 ans dans la maison de sa concubine, la Cour d’Appel en a à bon droit déduit que les conditions d’exercice de in rem verso n’étaient pas réunies et a ainsi légalement justifié sa décision. » ;

 

-          Dans un arrêt de la 1ère Chambre Civile de la Cour de Cassation en date du 24 septembre 2008 (n° de pourvoi 07-11928), il a été jugé :

 

« Attendu que Monsieur X et Madame Y ont entretenu une liaison de 1997 à 2003 ; que Monsieur X a financé des travaux de rénovation sur un immeuble acquis en 1998 par Madame Y avec le projet, non réalisé, d’y habiter ensemble ; que le 08 juillet 2003, Monsieur X a assigné Madame Y en paiement d’une somme principale de 129 119,04 € sur le fondement de l’enrichissement sans cause. (…)

 

Attendu que Monsieur X fait grief à l’arrêt attaqué de l’avoir débouté de sa demande (…).

 

Mais attendu qu’ayant souverainement constaté que Monsieur X avait, dans son intérêt personnel, financé les travaux de rénovation litigieux avec l’intention de s’installer dans l’immeuble avec Madame Y, la Cour d’Appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision. »

 

-          Dans un arrêt de la Cour de Cassation 1ère Chambre Civile en date du 20 janvier 2010 (n° de pourvoi 08-13400), il a été jugé :

 

« Attendu qu’après avoir relevé que le paiement par Monsieur X du capital restant dû sur l’emprunt contracté par Madame Y pour acquérir son pavillon ainsi que des échéances du prêt destinées à financer des travaux sur cet immeuble trouvait sa contrepartie dans l’hébergement gratuit dont il avait bénéficié chez sa compagne, la Cour d’Appel qui n’était pas tenue de procéder à la recherche invoquée, a souverainement estimé que Monsieur X devait régler le montant de la soulte due par Madame Y à son ex-mari et le solde de l’emprunt destiné à financer l’achat du pavillon, dans le but de dégager sa compagne d’une dette envers son ex-mari et de lui permettre de bénéficier en toute sécurité d’un logement avec l’enfant issu de leur union, faisant ainsi ressortir que le concubin avait agi dans une intention libérale et qu’il ne démontrait pas que ces paiements étaient dépourvus de cause ; que la décision est légalement justifiée ; »

 

Dans un arrêt en date du 19 décembre 2006, ROMERO/GUIRAL ( RG n°05/5853 ), la 1ère  Chambre A2 de la Cour d’Appel de MONTPELLIER a elle-même jugé en ces termes:

 

« Est mal fondée l’action de in rem verso formée par la concubine qui ne démontre pas l’absence de cause de son appauvrissement consistant en l’industrie consacrée aux besoins du ménage et de l’enrichissement corrélatif de son concubin, dès lors que sa participation aux dépenses et aux tâches de la vie commune trouvait sa cause d’une part, dans la relation de concubinage et d’autre part, dans son hébergement et celui de ses deux enfants à titre gratuit. »

 

Faisant application de cette jurisprudence, le Tribunal de Grande Instance de Montpellier a, dans un jugement en date du 12 mars 2019, retenu:

"(...) En l'espèce, il apparaît que M. X a retiré un profit personnel de son appauvrissement, sous la forme d'une économie de deniers (loyer, charges, et frais de bouche notamment) d'autant plus conséquente que Mme Y affirme, sans être démentie, avoir aussi accueilli, et donc logé et nourri, les enfants de M. X pendant les périodes où celui-ci était admis à exercer son droit de visite et d'hébergement.

La défenderesse affirme également, toujours sans être démentie, que la prise en charge par ses soins de frais relatifs aux deux quads détenus par M. X a permis à celui-ci de dissimuler, dans le cadre de ses relations avec son ex-épouse, qu'il disposait de véhicules de loisirs tout en n'acquittant aucune contribution à l'entretien et à l'éducation de ses propres enfants, en raison de sa prétendue insolvabilité.
Le profit personnel retiré par M. X de sa relation avec Mme Y, qui résulte des économies que cette relation lui a permis de réaliser, sans compter l'appropriation indue -également non démentie- de divers objets propriété de la défenderesse, est donc établi, et fait obstacle à ce que sa demande soit satisfaite.
Le demandeur sera donc débouté de l'intégralité de ses demandes, et condamné à indemniser Mme Y des frais irrépétibles qu'il l'a contrainte à exposer pour se défendre à la présente instance."